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Le design fiction au service du futur du communicant

RENDEZ-VOUS COM-ENT

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01/06/2020

Quand le futur ne peut se déduire, nous devons l’imaginer !

En 2019, COM-ENT initiait un travail de réflexion pour inventer notre futur, celui de la direction de la communication et par extension des métiers, des agences.… de l’écosystème dans son ensemble. Selon l’approche du design fiction, les futurs possibles de notre métier sont élaborés à partir d’interviews de personnalités issues du monde de la communication et des imaginaires de science-fiction : le but est d’imaginer et d’explorer des futurs radicaux pour questionner le présent.

Le 17 avril, Mathieu Griffoul, consultant et Julien Tauvel, futurologue, nous présentaient les grandes tendances médias à l’horizon 2030, tout en explicitant la démarche du design fiction. Voici la synthèse de ce rendez-vous dématérialisé animé par Agathe Lélu, directrice de la communication et membre du comité de direction de COM-ENT. 

Introduction au design fiction

  • Quoi ?

Le design fiction, discipline exploratoire des futurs, est née à la fin des années 1990, au Royal College of Art de Londres. Ses fondateurs les plus célèbres sont les designers Anthony Dunne et sa compagne Fiona Raby. Ils ont popularisé le terme de design spéculatif avec pour intention initiale de questionner nos rapports à la technologie, en en étirant les usages sur le long terme, et ainsi d’ouvrir un débat de société sur leur bien-fondé et leur utilisation à bon escient.

En 2018, Ford fait le buzz lorsqu’au CES, la marque présente son travail autour de “City of tomorrow” ayant pour vocation d’imaginer les futurs possibles de la ville de demain en termes d’infrastructures, de mobilité, questionnant les réponses apportées par Ford et ses orientations possibles. Aujourd’hui, différents secteurs s’approprient cette discipline. 

Le design fiction part du postulat (d’actualité !) d’un monde de désordre, de chaos. Ce monde (Vuca) est caractérisé par l’incertitude. A partir du moment où l’on ne peut plus déduire le futur, il faut l’inventer, l’imaginer : c’est le travail des futurologues, des prospectivistes et des designers. Le design fiction ne se veut pas prédictif mais exploratoire et entend élargir le spectre des futurs possibles, en imaginant aussi des futurs impossibles sur un horizon de temps est de 10/15 ans maximum. 

  • Comment ? 

Le design fiction ne se fonde pas sur les prédictions et prévisions à proprement parler, même si les signaux forts sont une base de départ. Le futur étant déjà parmi nous au quotidien, il convient d’observer les usages marginauxles signaux faibles qui demain pourront devenir mainstream. Avec l’aide d’anthropologues, les designers fictions tentent de cerner les micro-changements de la société, les nouveaux rituels. L’anthropologue Fanny Parise travaille ainsi sur l’anthropologie du confinement avec pour objectif de déceler ce qui en demeurera demain. Le design fiction s’intéresse aux sous-cultures (cultures marginales) et à ce qu’elles racontent sur la technologie et son usage. A côté de cette approche humaine, anthropologique, la recherche d’avant-garde est un autre domaine qui entre dans le champ d’observation du design fiction, ainsi que les innovations de rupture.

Le design spéculatif s’intéresse aux lieux de confluence des arts, des technologies et du design, où la représentation des usages de la technologie ne fonctionne pas nécessairement mais dont la mise en scène peut-être inspirante (ex : Royal College of Art). 

Les imaginaires de la science-fiction : si le design fiction n’est pas de la SF, cette dernière est toutefois un champ d’observation intéressant. La SF a nourri de nombreuses innovations au 20e siècle. Un nouveau cycle de la SF s’ouvre depuis début les années 2000, appelé Solar Punk. Optimiste, il s’intéresse à la capacité de l’humanité à maîtriser l’énergie solaire. 

Dans une démarche collaborative, le design fiction se pratique en réseaux. A la différence de la prospective, il n’entend pas uniquement modéliser mais bien matérialiser les mondes possibles (et impossibles) par le biais de représentations et ainsi les rendre tangibles, vivants. Et cela en créant des artefacts, des objets (vidéos, 3D, objets physiques), qui vont permettre d’expérimenter ces futurs, de les ressentir. En les rendant sensibles, le cerveau humain sera enclin à croire qu’ils sont vrais et à réagir selon. 

A titre d’exemple, on pourra consulter le travail réalisé par l’agence Imprudence sur le futur de la beauté

Le design fiction a pour objectif d’accompagner (entre autres) les entreprises pour stimuler la créativité du marketing, de la R&D, des innovations, ou encore de tester la robustesse de la stratégie, la résilience de la structure. 

Communiquer en 2030 – les futurs de la communication

A quoi ressemblera la communication en 2030 ? Comment les disruptions, les crises à venir vont impacter son rôle, son essence ? Comment l’évolution des supports, du digital vont modifier sa forme, sa nature ? Comment l’évolution de l’humain et des machines vont révolutionner sa conception ? Autant de questionnements que nous allons explorer par le biais du design fiction. 

Cf. le court-métrage Logorama, qui représente un futur dans lequel les publicités sont omniprésentes. Il nous laisse penser que la communication et le marketing se sont déjà réinventés, plus intégrés, plus invisibles, toujours plus personnalisés. Et qu’ils s’adaptent à la VR (réalité virtuelle) jusqu’à la modifier. 

  • Fakes et virtualités

– Les deep fakes sont un autre phénomène qui retient l’attention des designers dans le champ de la communication : “tout ce que vous voulez entendre, tout ce que vous voulez voir”. Leur usage se fait de plus en plus politique. Ce qui peut laisser présager, soit que la communication retrouva son véritable usage selon Bernays (avec un peu d’ironie) de propagande, soit permettra une belle économie en termes d’égéries ! Adobe et Facebook sont en train de mettre au point des solutions afin d’identifier les deep fakes dans les flux. 

Dans cette ère de méfiance et de fake news, “The futur is private”, comme le disait Mark Zuckerberg, ou semble tendre à l’être : de nouveaux influenceurs apparaissent sur des réseaux cachés, spécialisés. Leur reach et engagement sont rémunérés en crypto monnaie. Cf : le réseau social New life, réservé aux créas.

La bataille de l’opinion se jouerait ainsi sur la ligne d’un entertainment artificiel, gouverné par le fake avec possiblement des influenceurs, personnages synthétiques. Ce nouveau désordre mondial interroge la capacité d’action des groupes et des marques. Quand ces techniques vont investir le champ de la communication grand public, la capacité techno-financière des groupes à s’en emparer et à les déployer fera la différence. 

Le fake est intrinsèque au digital : c’est une matière qui n’est pas réelle, modifiable. Cette réalité synthétique, faite de VR, de RA et de deep fakes, est une opportunité et ne doit pas être vue uniquement par le prisme de la manipulation mais comme celle d’explorer des mondes imaginaires (cf. film Ready Player One). Le confinement a donné un nouveau prime time à cette réalité virtuelle destinée jusqu’alors aux gamers. Les mondes virtuels sont-ils un avenir probable pour nos interactions futures ? 

Le concert donné Marshmello dans le jeu vidéo de survie Fortnite laisse entrevoir à quel point le jeu est devenu un espace d’interactions beaucoup plus large : ce concert a réuni 10 millions de joueurs. De même, Animal crossing a connu un engouement supplémentaire avec le confinement. 

> Peut-on y voir un avenir possible pour les festivals annulés ? Les gens aiment se retrouver dans ces univers virtuels. D’autant plus avec la démocratisation des nouvelles plateformes technologiques (Zoom VR) et des nouvelles technologies de casques, accessibles à un plus grand public. 

> La VR sociale se développe avec l’apparition de plateformes de VR massives. En rachetant Oculus, Facebook a misé sur la VR en souhaitant en faire quelque chose de mainstream. L’ambition de Facebook est de créer un monde virtuel à l’échelle de ses 2 milliards d’utilisateur.rices, appelé le métaverse, peuplé d’avatars. A termes, les consommateur.rices peuvent être n’importe qui. Pour les marques souhaitant communiquer, ce n’est pas sans implication. Dois-je créer un avatar de marque ? Comment doit-il agir ? 

A côté de la VR, la RA (réalité augmentée) se développe également. Elle permet d’ajouter à la réalité concrète des informations supplémentaires, contextuelles ou non (ex : filtres photos Snapchat…). Le device dominant est assurément le téléphone pour accéder à des expériences de RA. 

Il est envisageable, demain, d’être équipé.e de lunettes pour bénéficier de ces fonctionnalités. Il y a quelques mois, Mojo Vision a sorti des lentilles sur le marché : le monde est ainsi augmenté en permanence. La RA peut être informationnelle, narrative… En tant que marque, quel usage en faire ?    

Le court-métrage Sight nous offre un aperçu des évolutions potentielles de la RA.

Dans cet environnement, le virtuel crée de nouveaux points de contact, que le numérique avait déjà multiplié. L’ère de l’expérience totale s’ouvre. A quoi va servir ce réel digitalisé ? Dans ce nouvel environnement, comment exister et sous quelle forme ? La VR et la RA ne sont pas les seules révolutions qui existent : avec l’IoT (Internet des objets), et notamment les assistants vocaux, les marques doivent s’adapter. Un travail sur l’identité de marque sonore s’impose sur les terminaux de paiement, les assistants vocaux pour permettre l’association de la marque au son. 

  • De nouvelles problématiques pour les marques 

> Comment faire essayer, tester pour l’industrie textile et cosmétique ? Des technologies sont déjà à l’essai.

> De nouvelles dimensions vont s’ajouter à la seule vue, c’est la révolution haptique (les technologies dites haptiques permettent l’interaction avec des objets virtuels : toucher, sentir… grâce à des gants ou à des casques).

Le parcours et les points de contact des consommateur.rices sont en train de se démultiplier. Les marques vont se transformer en univers complet.

Cf court-métrage : Hyper reality 

Nike est un pionnier de la réalité augmentée, son application Sneakers se base sur la technique des drops (disponibilité d’un produit en édition très limitée sur un temps très limité), utilisée de manière virtuelle. Les marques vont ainsi devenir interfaces. D’où l’intérêt de recruter dès maintenant dans les équipes de communication des designers d’interfaces et d’interactions. Une chose est sûre : la réalité mixte transforme toute interaction en expérience et rend la communication beaucoup plus pervasive

  • Le règne de la machine

La réalité mixte est le règne de la machine : elle ne peut pas exister sans l’intelligence artificielle ! C’est l’IA qui lui permet de reconnaître le monde qui nous entoure. D’ailleurs, l’IA n’existe pas à proprement parler : il est plus juste de parler de computer vision et de machine learning. Crise ou non (ex : appli de tracing StopCovid), la donnée est le nerf de la guerre d’aujourd’hui et de demain : comment la récolter et comment en diversifier les types ? C’est l’enjeu des GAFAs et des marques grand public. 

– Dans cette expérience menée par Ikea, la technologie permet de déterminer si les consommateur.rices ont le droit d’acheter un produit selon ce que le casque dit de leur activité cérébrale. 

Irait-on vers une communication cognitive ? Qui percerait le mystère du cerveau des gens ? Ce n’est pas possible : les ondes EEG ne permettent pas de déterminer autre chose qu’un état de concentration. 

L’autre mythe de l’IA est la prédiction. IBM travaille beaucoup sur les analytics prédictives. Qu’est-ce que l’intelligence prédictive ? La capacité d’anticiper des événements non encore survenus. Cela marche sur de la maintenance technique car les systèmes ont des règles simples, dépendantes, écrites, normées.

Qu’en est-il concernant les comportements humains ? Deux problèmes se posent : celui de la puissance de calcul nécessaire, car il faudrait croiser de très nombreuses données. L’autre faille de l’intelligence prédictive est de croire que nos comportements peuvent parfaitement être modélisés. L’imprévu a encore de beaux jours devant lui ! 

Là où l’IA peut toutefois nous aider, c’est sur la conception.
Si le film Chappie, dans lequel un robot s’éveille à la conception artistique, dépasse la réalité, l’IA pourra être une aide à la création mais non pas se substituer à l’homme.

Le design génératif (ou procédural) est un exemple de ce duo co-créatif homme/machine : il peut générer des mondes virtuels entiers selon le comportement des joueur.ses et leur exploration du monde. Cette technologie est déjà utilisée en architecture ou en industrie. 

Il est, en revanche, fort probable qu’à l’horizon 2030, nous aurons un N-1 qui soit une IA. Ces IA vont devenir à la fois des aides mais aussi des consommateur.rices ! Comme le dit le PDG de Netflix, Reed Hastings : “mes spectateurs et mes consommateurs sont d’abord des IA”. Quand on propose un film sur Netflix, on le propose à l’IA d’une personne, à un profil déterminé, non directement à la personne.

Créer pour une IA se fait depuis pratiquement le début de Google : être référencé, penser le référencement d’un site, c’est le penser pour des IA

  • Les IA pose la question de la responsabilité ! 

Qui est responsable de ce que va faire une IA et de son comportement ? Est-ce le.la consommateur.rice qui l’entraîne malgré lui et selon lui avec ses données ? Le développeur qui a codé l’IA ? N’est-ce personne, auquel cas l’IA serait une boîte noire ?

Le cas critique par excellence est celui de la voiture autonome. L’IA va-t-elle sauver le.la conducteur.rice ou les personnes mises en danger par la voiture ? Cet exemple donne à penser que le futur sera probablement beaucoup plus humain que ce qu’on l’imagine. L’humain retrouve sa place dans notre monde très digitalisé et avec lui, la responsabilité. 

– Les dark patterns, ces interfaces pensées pour rendre accros sont interrogées par les designers, les développeurs et les utilisateurs : on espère une révolution via la culture d’entreprise pour mettre fin à ces pratiques. Dans le futur, les marques vont devoir changer la manière dont elles imaginent les contenus, décélérer la fréquence à laquelle elles les adressent aux audiences. 

La question se pose également de l’utilité sociale des marques. Les consommateur.rices rejettent les messages de bonnes intentions, ils.elles veulent des actions concrètes, mesurables. Peuvent-elles toutefois être désintéressées ? Comment, en tant que marque, lever cette ambiguïté permanente concernant le tracing (obtenir des données pour aider l’utilisateur.rice ou à des fins mercantiles) ? Les marques vont-elles devoir assumer des positions politiques, la fonction première de la communication selon Bernays ?

Cf. le documentaire “Artifishal”, réalisé par Patagonia, marque “activiste”, engagée pour l’environnement. 

> Les marques vont-elles devoir devenir des agents de résistance 

Les consommateur.rices ont déjà commencé à hacker les systèmes de communication en les reprogrammant pour plus de confidentialité. Ils.elles reprennent le pouvoir sur l’information, quand ils.elles en ont envie. En la matière, l’appli Yukka est l’exemple le plus mainstream

> Une question se pose pour les marques à l’avenir : comment empuissanter le.la consommateur.rice mais aussi l’utilisateur.rice voire le.la citoyen.ne ? 

  • La fin du monde : communiquer à l’anthropocène

Anthropocène : ère géologique à laquelle les actions de l’Homme sur l’environnement sont considérées comme irréversibles. 

Capitalocène : ère où le capital est considéré comme responsable du désastre écologique, et non l’Homme en tant que tel. 

> Dans un monde qui touche à sa fin, la communication aura-t-elle encore du sens

Etudier les cas extrêmes permet d’explorer de la désirabilité à l’intérieur de ces mondes. 

Quel sera, dans ces mondes extrêmes, la nouvelle pyramide de Maslow ? Les besoins essentiels de l’Homme ? Comment communiquer dans des environnements relocalisés, hyperlocaux, avec leur propre système de communication, d’interaction et de comportements ? Ou dans le cas de nomadisation des populations en fonction du climat ? Ces questions sont fondamentales pour inventer la communication du futur.

Aujourd’hui, le design fiction est intéressant car il diffère de la tendance : les tendances sont auto-réalisatrices (ou considérées comme telles), quand l’exercice de design fiction refuse un déterminisme strict. Une fois le futur imaginé, il nous incombe de choisir un monde plutôt qu’un autre en mettant en pratique ses imaginaires. 

Questions et réponses

  • Comment intégrer le design fiction en amont d’une stratégie de communication ? 

Le design fiction invite à renouer avec une vision long terme, et à ouvrir le champ des possibles. Quels sont les futurs souhaitables ? Quel positionnement adopter par rapport à ces futurs ? A l’heure de la loi PACTE, le design fiction offre une démarche, des outils de nature à alimenter la réflexion stratégique et à aligner efficacité économique et utilité sociale de l’entreprise.

Il permet d’envisager le futur des supports de communication, des messages , et procède d’une démarche volontariste : “votre marque, votre entreprise seront ce que vous aurez envie d’en faire en tant que dirigeant.e”. Cette approche permet d’ouvrir les possibles entre technologies, évolutions sociétales et politiques : qu’ai-je envie de proposer en tant que dirigeant.e à mes différentes parties prenantes ?

De plus, le design fiction a la vertu de l’engagement et de redonner du sens, une vision à l’entreprise dans le monde de demain : en la matérialisant, il permet de voir plus précisément où investir, et s’avère un instrument de transmission du sens choisi pour la communication, permettant de fédérer et d’engager. 

  • Design fiction et prévision/prédiction ?

Le design fiction n’est pas de la prédiction. Il s’agit d’imaginer les futurs possibles et impossibles et ainsi dérouler le questionnement à partir de là.  

L’objet du design fiction se trouve moins dans le fait d’imaginer ces mondes-là que de matérialiser les changements que cela peut induire, dans nos quotidiens, au niveau des entreprises… Il s’attache essentiellement à concevoir ces changements pour interagir avec et permettre à notre cerveau de comprendre que cela peut se produire et ce que cela peut produire. L’une de ses principales vertus se trouve dans sa capacité à matérialiser les changements difficilement appréhendables par abstraction. 

  • Dystopie/utopie 

Le design fiction joue moins sur l’opposition utopie/dystopie que sur le fait de créer des mondes désirables, y compris dans des scénarios plus pessimistes. En cela, il se démarque encore de la prospective.

Lire l’article : 
Le design spéculatif et le monde d’après 

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